LES DERNIÈRES AMBITIONS RUSSES EN UKRAINE
Il y a bien longtemps, du moins pour moi, vers la fin des années quatre-vingt, début des années quatre-vingt-dix, je me suis retrouvé à une soirée politique tenue par RI (Révolution Internationale), un groupuscule conseilliste, où pendant trois/quatre heures je n’ai entendu parler que de « troisième phase de luttes », sans bien comprendre en quoi elle consistait et en quoi elle se différenciait de la première et de la seconde. Je m’y étais rendu parce qu’une collègue y était l’oratrice. C’est là que j’ai pu juger de toute la lourdeur de pensée de certains milieux dogmatiques.
En entrant en Ukraine, dans sa première phase de luttes, si je puis dire, la Russie avait pour idée de calmer les bandéristes et de ramener avec elle les deux républiques du Donbass.
Puis les kiéviens refusant finalement obstinément et bêtement (utopiquement, rêvassiquement, et plus encore barbarement) toute négociation, nageant dans l’idéologie et les fantasmes, la Russie a fini par leur faire comprendre et lâcher dans les media, et donc vers les media occidentaux du mondialisme (qui ont fait la sourde-oreille, comme de bien entendu), qu’il n’était plus question de récupérer simplement ces territoires, mais tous ceux qui autrefois formaient ce que l’on appelait la Novorossiya (prononcé : novoràssiyà). Des temps de Catherine II, entre autres.
Et les kiéviens ont continué à déblatérer des inepties, du genre : « on négociera lorsque nous serons arrivés à Moscou ». Croyant encore en la force de l’Otan, de l’Union Européenne et des États-Unis. Et en leurs propres talents. Or, la guerre, bien concrètement, s’accomode mal des illusions propagandistes et des tours de prestidigitation. Et n’a rien à voir avec un spectacle de music-hall.
Suite logique quand la raison et le sens du réel s’expriment et agissent, depuis quelques jours, les Russes et leurs alliés en sont donc arrivés, eux aussi, à leur « troisième phase de luttes ». Concrète, tangible et réaliste.
Le projet devient de plus en plus massif. Conséquent. Il a été cartographié vers la fin du mois de juillet par Dimitri Medvedev, le vice-président du Conseil de Sécurité de Russie ; personnage qui n’est pas rien et qui ne parle certainement pas en l’air.
Rappelons qu’il a été président de la Fédération de Russie de 2008 à 2012, avant de céder sa place à nouveau à Poutine.
Voici donc cette carte schématique du « projet final » :

extrait du bulletin n°93 de Stratpol (Xavier Moreau)
Soit, retraduit en oblasti :

et en couleurs :

1 – UKRAINE : une sorte d’État-croupion, quasi folklorique.
Retours approximatifs :
2 – à la Pologne : Galicie-Volhynie.
3 – à la Hongrie : oblast de Oujhorod à minorité hongroise, mais aussi ruthène (rusyn, dialecte slave oriental, surtout présent dans les Carpates du Nord).
4 – à la Roumanie ; oblasti de Tchernivtsi et de Vinnytsia ; ces deux oblasti possèdent des minorités roumanophones, dont en des zones de l’autre côté de la frontière avec l’Ukraine qui étaient roumaines autrefois, avant la Seconde guerre mondiale et la main mise stalinienne sur divers territoires de la région, après que les dirigeants roumains eurent choisi le mauvais camp au côté de l’Allemagne ; le plus étonnant serait le rattachement à la Roumanie de l’oblast de Vinnytsia qu’il serait plus logique de rattacher à la Moldavie orientale, indépendante (la Moldova orientală ; la Moldova occidentală étant une région de la Roumanie).
Extension de la Fédération de Russie :
5 – à la Crimée (déjà actée) et aux deux républiques du Donbass (pas encore rattachées).
6 – au reste du territoire de l’ancienne Novorossiya pré-bolchevique (1721-1917).
7 – à toute la zone nord-orientale de l’Ukraine, du Nord-Est au Sud de Kiev, soit une partie orientale de ce qui fut nommé à diverses époques de dominations, d’extensions ou régressions la Petite Russie.
8 – à la Transnistrie. On évoque également chez certains depuis 2014/2016, d’y adjoindre la Gagaouzie, petite entité autonome, pro-russe du Sud de la Moldavie indépendante (Sur ces deux régions en particulier, voir de précédents articles de ce blog).
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Quelques cartes de référence :
Le polonais en Europe :

Rappelons que le polonais est parlé aujourd’hui par des minorités en Ukraine ; aux siècles passés, elle fut longtemps la langue parlée par la très grande majorité des habitants de la capitale de la Galicie : Lviv (ëlvi-o) en ukrainien, Lwów (lvouf) en polonais, Lvov (llvof) en russe.
Extension des dialectes du rusyn :

En bleu foncé : majoritaires ; en bleu plus clair : minoritaires.
L’arc des Carpates (photo satellite) :

Aire d’extension des différentes langues et dialectes roumains :

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