Aller au contenu principal

UN AVENIR CRAMOISI

28 juin 2024

On n’arrête pas « le progrès ».

Quand j’apprends, dans mon entourage ou pas, que des personnes se font incinérer, du moins post-mortem, je ne peux m’empêcher de penser à ce qui fut pratiqué en Allemagne pendant la Seconde guerre mondiale dans les camps de concentration. Mais je pourrais ajouter dans tous les camps de concentration et goulags d’importance, allemands ou autres, pendant et même bien avant ou après la Seconde guerre mondiale, ici ou là dans le Monde, chez les « bons » comme chez les « mauvais »…

Et je me dis qu’il y a quelque chose qui cloche à la base dans cette pratique et est probablement lié – au-delà de tout aspect « hygiénique », anti-épidémique et « radical », ce qui n’est pas le cas hors des orgies guerrières qui glorifient la destruction – à une volonté de dénier à la Mort le droit de s’étaler publiquement en tout lieu d’un pays, y compris les contrées les plus reculées.

De dénier son droit, intrinsèque et patent, à se rappeler au bon souvenir des vivants. Puisque le nombre des fours crématoires, pardon des crematoriums (mauvais pluriel de ce mot néo-latin qui devrait je pense s’écrire crematoria), ne cesserait d’augmenter ; on en compterait 200 environ sur toute la France. Et avec eux, nouveau commerce juteux et ne risquant nullement le chômage, les cremati et crematæ – les grands brûlés et brûlées, intégraux et intégrales, bois des cercueils compris – ne cesse d’augmenter chez nous, du moins dans la colonie française de l’impérialisme anglo-saxon qui vire moribond.

Alors même que la Mort n’est jamais devenue, « publicitairement parlant », aussi banale et si obscène ; banalisée dans tant et plus de pays livrés à la guerre, aux tueries diverses et exactions des racailles tant autorisées que non autorisées. Grâce, entre autres, au progrès (sic) incommensurable des techniques de mise à mort.

Alors même qu’elle n’a jamais été autant exhibée, et de nos jours sous une forme animée (après le temps de la simple photographie), dans la mise en spectacle permanent du Monde. Parmi tous les media de plus en plus omniprésents : télévision, cinéma, Internet, téléphone portable…

On dirait surtout que certaines « bonnes âmes » ont en tête de ne pas vouloir se laisser envahir par les cimetières ; et de ranger tout le monde dans une petite case indifférenciée ; en mieux ou en pire dans quelque columbarium, mot qui dans mon esprit (mal tourné) me fait penser immanquablement à un colombinrium (sic). Tout en masquant, tant que faire se peut, la Mort ; pourtant ce qui n’est jamais que l’autre nom de la Vie sur la Terre.

Juste à la cacher dans un succédané, une parodie de boîte postale ou de consigne de gare possédant au mieux un nom, en une sorte de catacombe « moderne » sans les os. En voilà de la place gagnée, en voilà de la mort annihilée. Des morts annihilés. Ou pour le moins invisibilisés au maximum ; rendus spectaculairement discrets, et quasiment « propres sur eux », si l’on peut dire.

Cela étant, n’oublions pas que les plus riches peuvent sans problème être enterrés en cendres ou en entier dans quelque lieu que leurs familles posséderaient à l’écart des villes et des villages. Ce qui donc l’interdit à la masse des gueux. À qui on conseille de cramer vite fait après la mort, jusqu’au jour où cela sera devenu obligatoire et les cimetières rasés des paysages urbains puis ruraux. Moins ces quelques tombeaux ruraux épars réservés aux plus riches. Quand ladite technique et la sous-culture prendront définitivement le pas sur la Nature et sur l’Humain.

Petit fait d’histoire : pendant plusieurs décennies, le seul et unique crematorium de France a été celui du Père-Lachaise, à Paris. Il est entré en activité courant de l’année 1885, comme incinérateur des déchets humains provenant des hôpitaux, puis comme brûle-macchabée pour la première fois le 30 janvier 1889.

Ce n’est donc pas un hasard de constater que cette pratique, au départ essentiellement parisienne et de certains que l’on peut supposer avoir été hystériquement athées et/ou francs-maçons, a été autorisée très rapidement par la religion protestante, soit dès 1898.

Le protestantisme a toujours été à la pointe du « progrès », en particulier celui du capitalisme, celui du colonialisme, celui du suprémacisme en règle générale, et celui des mœurs jugées dans le vent et les plus modernes. Biens, bonnes. De la « prédestination » et du « bon choix » voulu par son dieu. Voir ce qu’il en est encore dans les pays anglo-saxons de L’Éthique protestante et l’Esprit du capitalisme, pour reprendre le titre de cet ouvrage majeur de Max Weber. Et en y ajoutant le judéo-talmudisme, on est au complet.

En bons larbins œcuméniques, et en soumis heureux de l’impérialisme occidental dominant, les pontifiants catholiques ont trouvé bon en 1963, lors du Concile de Vatican II, parmi tant d’autres choses, de permettre aux prêtres de se déguiser en clergymen tout en levant l’interdit sur la crémation. D’où son succès actuel, d’autant plus que la religion catholique est en pleine décrépitude, mais demeure encore comme une vague tradition populaire, une vague coutume pour les grands moments de la vie, du moins pour les natifs.

Beaucoup plus récemment on a vu la hargne papale, pour ne pas dire de l’anti-pape, à s’en prendre aux « anti-vax » au Vatican ou dans ses visites à l’extérieur. Et je viens de lire qu’il était maintenant envisagé d’interdire l’usage du latin dans toutes les cérémonies religieuses, pour décrédibiliser les dangereux intégristes – deux pelés et trois tondus, tous graines de fachos antisémites et partisans de l’immonde (sic) – qui osent encore utiliser cette langue antique rétrograde. Manque plus que le jour où se sera le globish très orwellien qui deviendra la langue officielle du Vatican. Quand cette entité n’aura plus rien à dire dans le domaine du Sacré qu’elle aura fini de massacrer.

From → divers

Commentaires fermés